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Abdelaziz Maoui, un monument du tourisme Algérien

Nidam Abdi (Consultant-expert en transition et développement numérique des territoires urbains. (Paris)), cette bonne plume qui avait travaillé au populaire quotidien « Libération » (Paris) a publié sur le journal économique, ver­sion online, Les Échos (Paris), cet article afin de marquer le décès, dans l’anonymat du grand bâtisseur du Tourisme algérien, Abdelaziz Maoui Lire l’article de la source.

L’auteur (Said Boukhelifa) a rendu hommage, à Abdelaziz Maoui, en faisant publier une interview, sur les sites online «La Voix d’Algérie» de Idir Tazerout et « Lakom.info.com », Lille-France de Mohamed Chouaki, ainsi que sur le journal, le Quotidien d’Oran.

Abdelaziz Maoui Ministre du Tourisme AlgérienMaoui Abdelaziz un monument du Tourisme algérien

Maoui Abdelaziz nous a quittés ce vendredi 26 octobre 2018 dans un anonymat total, la presse n’a pas évoqué ni sa disparition, ni évoqué son parcours exceptionnel et historique. Il fut le plus grand ministre de l’histoire du tourisme depuis 1962.

L’auteur l’a connu comme son ministre de tutelle. Il en parle avec admiration et tristesse dans une interview réalisée par lui même.

Qui était vraiment Abdelaziz Maoui ?

Tout d’abord, je voudrais souligner que cette triste et subite mauvaise nouvelle de sa disparition, nous a surpris, nous tous les anciens des sixties et seventies, elle nous affligea aussi. Son décès un vendredi n’a permis qu’un tout petit nombre mis au courant d’assister à son enterrement, sinon une foule immense serait venue. C’était le père des années glorieuses touristiques que je viens de citer. En effet, il fut chargé par Houari Boumediene de diriger ce secteur économique important de 1965 à 1977, soit douze années. Durant la révolution, il fut instructeur à l’école des cadres de l’ALN, crée par Boussouf, patron du MALG., dont le directeur était Laroussi Khalifa, en 1957 et ancien sous-préfet de Versailles (Paris) avant. Algérie et du secteur. Parmi les stagiaires dans cette école, un jeune, Abdelaziz Bouteflika (formation de contrôleur) et un certain Toufik M. À l’indépendance, il fut directeur de cabinet du ministre de l’intérieur, Ahmed Medeghri en 1963, puis secrétaire général du ministre des affaires étrangères Abdelaziz Bouteflika en 1964.

Quelle fut son œuvre majeure ?

Abdelaziz Maoui avec BoumedieneSon œuvre colossale fut la construction de stations balnéaire d’Est en Ouest et d’une belle série d’hôtels dans les Oasis (Erg oriental) et dans la Saoura (Erg occidental), le tout dans une architecture inédite et qui fit l’admiration des plus grands architectes du monde. Grâce à l’apport et l’implication de Fernand Pouillon, un architecte de génie. Ainsi un essaimage de structures d’hébergement furent ouvertes à El Kala, El Mourdjane 4 étoiles, le Plazza international (Seybouse) 5*,Annaba, Le Rocher (El Muntazah) Seraidi, 4 étoiles, Essalem Skikda,4 étoiles, Chelia 4 étoiles, Batna, El Hidhab 3 étoiles Sétif, El Minzah Moretti 4 étoiles ,Iles, Le Port (El Marsa) 4 étoiles, El Riadh 4 étoiles, El Manar 3 étoiles, les trois à Sidi-Fredj, auxquels il faudrait rajouter la ma­rina, port de plaisance, le centre de vacances, et le fameux restau­rant Le Vivier (ou le poisson vivant était servi après avoir été prélevé dan un vivier spécial, à l’intérieur de ce restaurant.)

Le Sable d’Or Zeralda 4 étoiles, le Mazafran 3 étoiles, le Centre européen de tourisme (Club Med) 4 étoiles de Tipasa, le complexe de Tipasa-Matarés, hôtel La baie 4*, l’hôtel Résidences 3 étoiles, plus des bungalows. Enfin, à l’Ouest, le complexe des Andalouses Oran, qui fut inauguré le 16 juin 1973 par le président Boumediene.

Quand, on investit dans la pierre, on doit investir dans l’homme. Maoui pensa à la formation. Il fit ouvrir les instituts de Bousaada et de Tizi-Ouzou en 1972, puis celui de l’Aurassi, en 1976, pour les managers et encadrement supérieur. Et il fit envoyer toute une kyrielle de jeunes se former à Beyrouth (1968-1970), Paris (67-68),Vichy (70-71),Thonon-les Bains (1970), Torino (1970), Munich (1968-1970) etc.

Quand la construction des hôtels fut terminée et la formation, entamée, il fit ouvrir des représentations de l’ONAT, afin de faire connaître la destination Algérie, à Frankfort (RFA), Stokholm (Suède) qui nous avait valu des charters de scandinaves, les des­cendants des vikings qui séjournaient à Moretti et à la Madrague. Ainsi des suédoises et des danoises allaient danser le samedi soir au Night Blue Note de la rue Didouche Mourad, Alger. Et à Lon­dres, Paris et Bruxelles des bureaux furent également ouverts pour faire la promotion. Il réalisa ainsi, le triptyque indissociable, investissements, formation, promotion touristique.

Il était entouré par quels hommes ?

De mémoire, je ne citerais que quelques-uns. Par des coopé­rants techniques comme Michel Daviaud, et Annick Garnier, mais par beaucoup de nationaux, à l’image de Abdelkader Khalef, DG ONAT, qui, sur le terrain suivait le chantier monumental de la construction des hôtels sahariens et complexes balnéaires. Ce dernier fut le président de la JSK (100% kabyle) et le fondateur du Jumbo Jet ! Kaid-Harnmoud, DG Sonatour, Abderrahmane Berrouane DG ATA, Belgreine Bouhadjar, DG des complexes de Tipasa, Cherif Rabhia DG ETT (entreprise des travaux touristiques) ou Hafida Mansour-Chaouch, la pionnière, chargée de la promotion Djamel Tamzali … etc.

Les résultats de cette politique touristique, investissements, formation, promotion ?

Andalouses Maoui TourismeCette politique, bien pensée et structurée, car adossée à une conviction galvanisante et qui est absente, en haut lieu, de jours et cela depuis plus un quart de siècle, nous a valu, un Impact énorme. Entre 1973 et 1978, tous nos hôtels balnéaires étaient complets, six mois à l’avance par les réservations des grands tour-operators européens (Neckerman-Rf’A, n° 2 en Europe Thomson Holidays (GB) n° 1 en grande Bretagne, les agences françaises, Cosmovel, Transtours, Soleil Voyages, Grandes vacances, Climat, les agences belges et Hollandaises, Sunair, Transair, etc Nos hôtels du sud, étaient également plein six mois à l’avance pour les vacances d’hiver et de printemps, à travers les circuits de la boucle des oasis et celui de la Saoura. Nos expéditions dans le Hoggar et dans le Tassili, étaient full, trois mois à l’avance !
Nous travaillions de jour, comme de nuit car les charters bondés de touristes arrivaient en nocturne à Dar-El Beida.
Et ce travail nous plaisait beaucoup, car voir arriver cette foule cosmopolite, belle et parfumée, souriante, parlant des langues différentes, Il faisait bon de faire un tour dans nos complexes tou­ristiques, ou’ régnaient une ambiance internationale.

Et l’ambiance touristique dans les grandes villes ?

Je parlerai d’Alger où j’habitais et où j’habite jusqu’à l’heure, Les restaurants étaient pleins de touristes, qui vivaient leur liberté de culte, dans une ambiance de tolérance, de vivre-ensem­hle, de rëspect d’autrui, Certains servaient librement « l’assiette anglaise » (jambon) et le civet de marcassin (Mon village, Mal­lorca, Mère Michèle, Hôtels Saint-Georges et El Aurassi), Les restaurants huppés étaient ouverts durant le ramadhan, les étrangers y mangeaient. On peut dire qu’Alger était vraiment méditerranéenne !

Elle était, également, assez propre, les taxieurs corrects, Beaucoup de bars ouvraient jusqu’à 23h et ils étaient nombreux, des dizaines. 90% ont été obligés de fermer cette dernière décennie et pour cause car, quand le père décède, les héritiers se voient refu­ser le renouvellement de la licence autorisant la vente d’alcool. C’est à Contre-courant du tourisme international.

Que pensez-vous de la situation actuelle ?

Sur le plan réceptif, du tourisme international, c’est une catastrophe, le balnéaire il faut l’oublier durant longtemps à l’endroit des étrangers qui ne viennent plus pour nos plages depuis 1990. Ils vont vers les autres pays de la Méditerranée (au nombre de vingt). Il nous reste plus que le tourisme saharien, où la culture tou­ristique existe encore et qui a disparu au Nord depuis une trentaine d’années. Ensuite le tourisme culturel avec nos 21 sites romains, dont la majorité demeure méconnue, à part Tipasa, Djemila, Tim­gad, Hippone. L’Algérie est la deuxième destination mondiale en termes de vestiges romains, après l’Italie, l’antique Rome.

Vous semblez nostalgique de cette période ?

Comment ne pas l’être, car la nostalgie vous prend, quand les promesses du ‘passé ne sont pas rendues par le présent. En plus, les seventies nous ont valu beaucoup de remerciements, félicita­tions et encouragements de la part de nos partenaires étrangers, tour-operators et agences. Depuis cette époque, nous recevons un succédané de chapelets de critiques objectives, désobligeantes, mais méritées, qui nous taraude l’esprit.

Ces trois dernières décennies furent désastreuses. Cette déplorable situation nous a laissé que de la frustration et de l’amertume car ce fut un immense gâchis, cette richesse dormante inexploité que représentent nos immenses potentialités touristiques. Nous sommes devenus de mauvais élèves du bassin méditerranéen.

Le regretté défunt, notre ministre Maoui Abdelaziz a dû partir avec une immense tristesse, de voir sa monumentale œuvre abandonnée et rendue obsolète. Un grand homme, qui mérite que son nom soit porté sur le fronton de l’Ecole nationale supérieure du Tourisme, El Aurassi Alger, qui fut son œuvre et dont je suis issu, parmi les premières promotions. Et que pour les prochains diplômés en 2019, des trois instituts de Bou-Saada, Tizi-Ouzou et Alger leurs promotions soient baptisées de son nom.

Said Boukhelifa

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